mardi 1 novembre 2016

La gauche la plus bête: le Dumbo de Matignon fait son show


Manuel Valls, depuis la Côte d’Ivoire, a accusé Emmanuel Macron et Arnaud Montebourg, d’incarner « la vieille politique" et dans une curieuse formule qu’il aurait reprise de Jean-Christophe Cambadélis il joue, comme à son habitude, au procureur, et il le fait contre les siens : « La plus bête du monde, la gauche française peut le devenir. Elle n'est pas à la hauteur de ses responsabilités ».
Valls utilise des expressions chocs dont il ne semble connaitre ni le sens ni l’étiologie et qui se retournent contre lui. D’abord associer Montebourg et a fortiori Macron à la vieille politique parait peu pertinent alors qu’ils incarnent plutôt le renouveau et la jeunesse, face à ce mélange détonnant d’indécision, de roublardise et d’enfants faits dans le dos par celui qui occupe l’Élysée depuis presque cinq ans.
C’est Guy Mollet, premier secrétaire de la SFIO de 1946 à 1969, et son fossoyeur, qui utilisa en premier la formule « la droite la plus bête du monde » dans des circonstances très particulières. Son parti, la SFIO, était le plus important de l’Assemblée nationale et après avoir été Président du conseil en 1956 et 1957, où il s’illustra en quelques mois, par la débâcle de la campagne de Suez, par les « pouvoirs spéciaux » et la « pacification » en Algérie, par les débuts de la torture, par l'envoi d’un demi-million de soldats du contingent et par l'affaire Ben Bella, Guy Mollet était un faiseur de roi et adoubait les gouvernements du centre où siégeaient nombre de ses amis socialistes.
Mollet emploie la formule en mai 1957 lors de la chute du gouvernement Gaillard en obtenant de son parti qu’il ne participât plus aux gouvernements de cette droite qu’il jugea la plus bête du monde parce qu’elle se refusait à lui. Il en résulta pour les socialistes, et toute la gauche, une très longue absence du pouvoir jusqu’en 1981 ! La plus bête qui eût été alors, sans doute, fut la gauche socialiste. La formule connut une nouvelle jeunesse par Mitterrand, sous la cohabitation entre 1986 et 1988, quand il roula Chirac dans la farine.
Guy Mollet, c’est une très grosse épine dans la chaussure des socialistes, un symbole de compromission et le modèle des politicards roués dans l’art des synthèses idéologiques et des coups de mentons, et comme Marcel Déat et Pierre Laval, une référence bien encombrante, synonyme de néofascisme et de collaboration. Les dignes héritiers de Guy Mollet, ce sont justement Hollande, pour la mollesse et les méandres de la pensée, et Valls pour les mouvements de jugulaires.
La référence à la formule de Guy Mollet dans la bouche de Manuel Valls n’était pas judicieuse mais il est vrai que c’est Cambadélis qui la lui avait soufflée, Cambadélis qui, en bon ancien trotskyste, s’y connait en coups tordus et en combines d’appareils. Ce que Valls ne voit pas. Car cette formule n’est pas anodine quand elle intervient au moment même où François Hollande saborde, au travers de propos que les journalistes du Monde ont pieusement recueillis, tout ce que la gauche socialiste a incarné depuis trente ans: l’antiracisme, le multiculturalisme et la victimisation des minorités, la culture de l’excuse, une politique pénale laxiste, la repentance mémorielle, l’immigration chance pour la France, le vivre-ensemble avec les musulmans. Hollande n’est pas seulement en train de se droitiser, il fait sien un discours que lui et ses amis n’ont cessé de fustiger pendant des décennies, sous les appellations de populisme et de lepénisation des esprits.
Il n’y a aucune maladresse de la part du Président mais un calcul assez machiavélique, et pour tout dire assez répugnant, car il montre à quels point ces gens ne croient à rien et manipulent les électeurs. Parce que François Hollande a pris acte, comme Mélenchon, du fait que les Le Pen avaient raison avant tout le monde, et que s’ils veulent survivre politiquement et ne pas se faire hara-kiri comme Guy Mollet et la SFIO ils n’ont pas d’autres solutions que d’emprunter les bottes que d’autres ont chaussées avant eux. Voilà le sens de la formule subliminale de Cambadélis : la gauche la plus bête du monde serait cette gauche socialiste désunie qui ne verrait pas en François Hollande son candidat naturel, un François Hollande prêt à sacrifier le parti socialiste pour se faire réélire sur des thèmes populistes grâce à l’addition des voix du centre gauche et de la droite.
Valls donne l'impression de dire n’importe quoi ou à mauvais escient pour créer le buzz, tel un piètre communicant. Il est constant dans ses maladresses et ses erreurs d’appréciation, au point où on se demande s’il ne partage pas avec son mentor supposé, Michel Rocard, la même absence de sens politique, la même incapacité à traduire dans un parti structuré une ligne idéologique. Il incarne l’impuissance de la deuxième gauche française, gauche libérale ou gauche américaine, de Mendès-France à Defferre et de Delors à Rocard.
On se rappelle son combat hallucinant contre Dieudonné, jusqu’à obtenir du Conseil d’État l’interdiction de son spectacle, puis à l’inverse, ses discours enflammés pour la liberté d’expression quand il fallait faire souffler sur la France l’esprit des Je suis Charlie. Ou ses diatribes contre les livres de Houellebecq et de Zemmour qu’ils nous engageaient à ne pas lire, une mise à l’index encore jamais vue de la part d’un chef de gouvernement dans notre démocratie. Ou son emploi de mots forts et outrés qui disaient le contraire de la réalité, comme ceux de ghetto et d’apartheid pour désigner ces cités d’immigrés qui ont pour caractéristique d’être, non des lieux de relégation, mais des zones de non-droit qui ont fait sécession, malgré les milliards de subventions et d’exonérations qui les arrosent.
La mentalité de curé donneur de leçon de notre Premier ministre va avec sa façon de battre sa coulpe qui confine au masochisme. Au point que l’on peut s’interroger d’entre Hollande et Valls lequel sera le premier  à parvenir de liquider le parti socialiste, l’un distillant ses petites phrases et son venin et l’autre agitant devant les membres horrifiés de son parti des chiffons rouges comme la déchéance de nationalité ou la loi El Khomri. On insiste à juste titre sur l’indécision pathologique et la veulerie de François Hollande, en omettant que dans les grandes lignes il est cohérent avec lui-même. Il est bon de rappeler que Manuel Valls change d’idées et de discours à chaque occasion, et souvent à 180º.  
Dans l’incompréhension d’une formule célèbre, Valls s’était déjà illustré en 2015 quand il reprocha à Michel Onfray d’avoir déclaré « qu’il vaut mieux avoir raison avec Alain de Benoist (philosophe pestiféré, fondateur de la nouvelle droite et proche de la ligne Philippot au Front National) que tord avec Bernard-Henri Lévy (le faux philosophe, faiseur de guerres et pourfendeur de dictateurs) ». Onfray reprenait la formule « qu’il valait mieux avoir raison avec Raymond Aron que tord avec Sartre », une évidence avec le recul, Sartre s’étant trompé dans tous ses engagements, sombrant dans toutes les idéologies du siècle précédent. Valls en fut outré, accusant Onfray de tous les crimes, ne percevant pas qu’un intellectuel se doit à la recherche de la vérité, non à l’esprit partisan, à quoi le philosophe répondit au Premier ministre qu’il était un crétin, ce qui n’était pas aimable mais fort juste.
Où l’on voit que la lecture régulière de quelques livres en plus des notes et briefings des conseillers qui l'entourent serait bénéfique à notre Premier ministre. On ne saurait reprocher à Manuel Valls d’être limité intellectuellement et de n’avoir qu’une vague licence d’histoire dans un milieu de gens surdiplômés. Certains ont été de grands chefs de gouvernement sans avoir fait d’études. C’est son arrogance et ses prétentions qui sont insupportables, quand il n’est qu’un apparatchik de parti et qu’il n’a pas même sur les énarques qui le cernent l’avantage de la connaissance du terrain. Entre les ectoplasmes et les crétins la sottise de l’oligarchie est partout. Chaque jour, nous avons de nouveaux témoignages de l'inculture crasse et de l’incapacité des élites politique, médiatique et économique à faire face aux problèmes. France, voilà comment ton intelligence fout le camp et ton remplacement culturel est en cours !
Les capacités limitées du Premier ministre éclate donc au grand jour à nouveau avec sa sortie à propos de la gauche la plus bête du monde et il semble que les médias, dans la façon peu flatteuse qu’ils ont de photographier et de filmer notre petit Adolfo se sont rangés à ce constat. On le voit ces temps-ci, guère à son avantage, ses grandes oreilles bien décollées du crâne. J’avais osé, déjà, cette comparaison dans un précédent article (Hollande en lévitation et Valls au pays des merveilles), Valls me faisant penser à Dumbo, l’éléphant aux grandes oreilles des productions Walt Disney. Il plane comme Dumbo ! Surtout que dumbo ça veut dire crétin en étatsunien…





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